Eric Toussaint *
III. La Bolivie est-elle sortie d’une période très agitée ?
Comme indiqué dans le point 5 de la partie I, le gouvernement d’Evo Morales a dû affronter en 2008 une opposition très violente de la droite représentant les intérêts de la classe capitaliste locale (industriels, grands propriétaires fonciers, groupes financiers) liée aux intérêts des transnationales privées qui exploitent les ressources naturelles (pétrole, gaz, différents minerais). Álvaro García Linera, vice-président de la Bolivie, offre dans une interview (37) une vision stratégique de ces affrontements. En voici quelques extraits particulièrement significatifs. Il part du constat que la droite refusait d’accepter sa situation de force politique minoritaire et avait opté pour la séparation entre les provinces orientales riches et le reste du pays où se trouve la capitale La Paz. Ensuite, il décrit la politique suivie par le gouvernement qui a refusé l’affrontement à plusieurs reprises avant de choisir de frapper fort.
« La droite n’était pas disposée à être incluse dans le projet national-populaire comme force minoritaire et dirigée, et elle optait pour la déflagration territoriale. La lutte pour le pouvoir se rapprochait du moment de sa solution belliqueuse ou finale dans la mesure où, en dernière instance, le pouvoir de l’État est coercition. C’est ce que nous appelons “le point de bifurcation”, c’est le moment où la crise de l’État, entamée huit ans auparavant, se résout soit via une restauration du vieux pouvoir étatique, soit via la consolidation du nouveau bloc de pouvoir populaire. (…)