Alberto Garzon (IU) et pablo Iglesias (Podemos) |
Les
élections générales du 20 décembre 2015 ont confirmé les données essentielles
de la situation politique espagnole et, en particulier, la crise majeure du
régime issue de la Transition de 1978 négociée après la mort de Franco.
Le
bipartisme est fini ! Que ce soit le PP, parti de la droite
postfranquiste, ou que ce soit le PSOE, aucun de ces partis n’a la majorité et
le nombre de députés suffisants pour constituer un gouvernement. Une époque est
révolue, de nouveaux partis ont émergé comme Podemos ou Ciudadanos. La question
des alliances est devenue centrale pour la constitution d’un gouvernement.
Le
PSOE choisit une alliance à droite.
Le
Roi a d’abord appelé le PP, parti arrivé en tête avec 27 % des voix, pour
constituer un gouvernement. Celui-ci étant incapable de trouver des alliances
et une majorité de députés, le Roi a ensuite appelé alors le PSOE arrivé
deuxième. Malgré la proposition de Podemos de constituer un gouvernement à la
"valencienne" réunissant toute la gauche et le soutien ou
l’abstention des courants nationalistes catalans ou basques …, le PSOE va
construire une alliance avec un parti de droite Ciudadanos. Ce parti, en raison
de sa courte existence, n’a pas les franquistes identifiés dans ses valises et
n’a pas eu le temps de sombrer dans la corruption totale comme le PP, mais est
un réel parti libéral de Droite dont la base constitutive est l’ « l’unité
de l’Espagne » (1). Dans un deuxième temps, le PSOE a cherché l’abstention
des députés de Podemos pour accéder au gouvernement. Que ce soit sur les
politiques d’austérité ou sur le droit démocratique à décider à travers le
referendum en Catalogne, l’accord PSOE – Ciudadanos rendait impossible tout
accord avec la gauche. L'orientation de Podemos était alternative à celle du
PSOE dans le sens où elle supposait la rupture avec Ciudadanos. Le PSOE, en
refusant une coalition gouvernementale de gauche, porte l’entière
responsabilité de l'échec et de retour aux élections
Nouvelles
élections le 26 juin 2016.
L’élément
nouveau pour ces nouvelles élections du Parlement, Las Cortes, est l’alliance
Podemos avec IU. Lors des élections de décembre, cette alliance n’avait pas été
possible. Podemos, dans un changement pragmatique de ligne comme nous en avons
connu d’autres dans le passé récent (caste et PSOE, droit à
l’autodétermination, contre la « soupe de sigles »), et IU ont trouvé
un accord politique avec visibilité des sigles et répartition des député-es
selon les résultats obtenus le 20 décembre dernier.
Cette
alliance est un nouvel espoir pour toutes celles et ceux qui veulent en finir
avec l’austérité et la Droite. Cette nouvelle alliance doit prendre garde à
respecter les "Confluences" (alliance large en Catalogne, Galice et
dans le pays valencien) et leurs revendications.
Les
différents sondages donnent, avant même le début de campagne, autour de 25% des
intentions de vote à cette nouvelle alliance, devant le PSOE qui baisse un peu
à 20%. La donne change à gauche, le PSOE continue sa baisse et perd la main.
Nous
ne pouvons qu’espérer que la dynamique unitaire à gauche alliée à la volonté
d’en finir avec la droite bouleverse le totalement le paysage politique. Si les
sondages donnent 25% à cette alliance, ils donnent 27% au PP, ce qui n’est pas
insurmontable. Le PP est gangrené par la corruption, éclaboussé par les
scandales et de plus Rajoy, actuel chef du gouvernement, est contesté en
interne.
La
pire des situations pour le PSOE
Soyons
optimistes, si les sondages ou même mieux encore, l’alliance Podemos –
Confluences – IU arrive second voire premier, le PSOE va se retrouver dans une
situation qui ne peut que le diviser durement et durablement. Nous sommes loin
des négociations du premier tour et de l’accord avec Ciudadanos.
En
fonction de l'arithmétique parlementaire, soit, le PSOE accepte un accord avec
l’alliance de gauche, mais cet accord ne peut se faire à ses conditions et pour
les barons du PSOE, il est encore aujourd’hui impossible de penser un accord
avec Podemos et d’accepter l’idée d’un referendum en Catalogne. Si cet accord
se fait, il aura alors un prix interne sérieux.
Soit,
le PSOE répondant aux sirènes de la Troïka et de certains de ses barons comme
Felipe Gonzalez, et trouve un accord de gouvernement avec le PP et Ciudadanos
ou s’abstient pour permettre la constitution de gouvernement et nous voyons
bien la crise majeure qui s’ouvre.
Un
nouvel espoir
L’état
espagnol bouge à gauche. Déjà lors des élections de Décembre nous avons vu que
les confluences arrivaient en tête avec 28% en Catalogne ou seconde en Galice
avec 26%. C’est cette dynamique qui est porteuse d’espoir. Les sondages
indiquent une attente forte, le fait que l’alliance Podemos-Confluences-IU soit
majoritaire chez les moins de 55 ans en est un exemple. Le PP n’est plus majoritaire
que chez les plus de 65 ans !
Ca
bouge aussi à gauche du côté des partis, la proposition d’Ada Colau de
construire un nouveau parti à partir de la Confluence En Comu est aujourd’hui
acceptée par Podem (le représentant catalan de Podemos), ICV – EUIA ( Izquierda
Unida), Cataluna Si que es Pot… Un grand parti unitaire de gauche devient
possible en Catalogne.
Au
pays basque (communauté autonome et Navarre), si pour l’instant aucune
convergence électorale n’est envisageable entre la gauche indépendantiste d’un
côté, IU et Podemos de l’autre, Arnaldo Otegi, porte-parole de la coalition
Bildu s’est dit prêt à soutenir un « gouvernement de progrès » qui
sortiraient des urnes en juin, mettant dans la balance la question du droit à
l’autodétermination, comme le font la gauche et l’extrême gauche catalanes.
Solidarité
et mobilisation pour une victoire de la coalition de gauche le 26 juin
Ces
quelques semaines vont être importantes pour toutes celles et ceux qui
cherchent un débouché politique à gauche. Un bon score et une dynamique
enthousiasmante dépasseront sans problème les frontières et ne peuvent que
trouver un écho avec le combat contre la loi El Khomri et les Nuits debout.
Notre
solidarité est d’autant plus nécessaire qu’il faudrait être très naïf pour
croire que l’Union européenne, la BCE et les fossoyeurs du peuple grec vont
rester les bras croisés et spectateurs.
Nous
apportons tout notre soutien à cette coalition, leurs espoirs sont les nôtres.
Le
9 mai 2016.
François
Caussarieu - Pierre Marion – Richard Neuville - Francis Viguié, membres de la
commission Etat espagnol d'Ensemble !
1)
Ciudadanos est une formation politique « unioniste » créée en
Catalogne en 2006 en opposition au nouveau statut d'autonomie. Albert Rivera en
est le leader depuis la création. En 2014, le parti a décidé de s'implanter à
l'échelle nationale en dénonçant notamment la corruption.
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