Avancées réelles et limites d’une révolution démocratique
Richard Neuville, 28 Mars 2009 *
Le processus révolutionnaire bolivarien, engagé depuis une décennie, a suscité de nombreuses controverses et analyses car il a, non seulement, constitué une rupture radicale avec le modèle dominant au Venezuela, mais il a également eu des répercussions sur l'ensemble du sous-continent latino-américain. De fait, il est devenu une référence, voire un modèle pour les peuples, les acteurs sociaux et politiques latinos et, plus largement, il influence certains secteurs au sein du mouvement altermondialiste. Ce changement est principalement incarné par Hugo Chávez Frías, leader charismatique qui est devenu pratiquement une icône vivante en Amérique latine pour les peuples latino-américains. Y compris en Europe, pour une partie de la gauche, ce processus suscite un réel engouement et, pour certains, alimente la réflexion sur les réformes que pourraient engager un pouvoir de gauche de transformation sociale.
Dès son origine, les Alternatifs ont soutenu le processus en cours au Venezuela et se sont évertués très modestement à le populariser en France. Lors de ce dixième anniversaire, ils réitèrent leur soutien aux réformes réalisées et leur solidarité au peuple vénézuélien, qui se lève contre le modèle de domination, caractérisé par l'hégémonie impériale étasunienne. Mais, ils entendent avoir un regard lucide sur la politique menée. Et, cette analyse critique ne signifie, en aucune manière, mêler sa voix aux médias dominants occidentaux, qui n’ont de cesse de dénigrer et de caricaturer le leader Hugo Chávez Frías. D’ailleurs, les Alternatifs dénoncent sans ambiguïté la propagande anti-chaviste orchestrée par la classe médiatique française et européenne. Pour autant, en tant qu'autogestionnaires, ils ne s'interdisent pas d'émettre certaines réserves et de s’interroger notamment sur l'hyper personnalisation du pouvoir car elle pose, bel et bien, la question de la capacité à engager un processus révolutionnaire en dehors de phénomène de leadership et en rupture avec le rôle prédominant de l'Etat.
Incontestablement, l’élection d'Hugo Chávez a permis de changer la vie de millions de vénézuéliens et de modifier radicalement la structure du pays. Le processus révolutionnaire bolivarien comporte de réelles avancées et constitue probablement l'événement politique le plus important de ce début de XXI è siècle. Mais il comporte aussi ses limites qu'il importe d'analyser avec sérénité sans se situer dans une posture de donneurs de leçons. Avant de dresser, sans qu’il soit très exhaustif, un bilan de la Révolution bolivarienne, tentons de rappeler les principales étapes et les éléments de rupture dans ce processus.
Les changements institutionnels
Le 4 février dernier, Hugo Chávez a célébré le dixième anniversaire de son accession au pouvoir au Venezuela. Elu Président de la République avec 56,7% des suffrages en décembre 1998, il prend ses fonctions le 4 février 1999 conformément à la constitution en vigueur. Dans les jours qui suivent son arrivée au Palais de Miraflores, il signe un décret et convoque un référendum pour changer la constitution de la IVe République, adoptée en 1961 et se défaire ainsi partiellement de l'héritage institutionnel de ladite "démocratie pétrolière". Le printemps suivant, une assemblée constituante est élue (92 % des membres sont issus du Pôle Patriotique), elle engage une large concertation auprès de la population pour rédiger une nouvelle constitution, qui est adoptée le 15 décembre 1999 avec 71 % des voix. La constitution bolivarienne innove dans bien des domaines et servira de référence pour les nouveaux pouvoirs en Bolivie et en Equateur. Dans son préambule, l'objectif d'établir "une société démocratique, participative et protagoniste". Le droit des citoyens à participer librement aux affaires publiques, de manière "directe, semi directe ou indirecte" est déclaré fondamental dans le titre IV. Ce droit est compris au sens large, en favorisant la participation de la population aux "processus de formation, d'exécution et de contrôle de la gestion publique". Elle prévoit également la possibilité de révocation à mi-mandat de toutes les fonctions électives et limite le renouvellement des mandats. (cf. R et V n° 222, p.21)La rupture et les tentatives de déstabilisation
En 2000, Hugo Chávez remet son mandat en jeu, il est réélu président de la République avec 60 % des voix. Dans la foulée, il adopte le Plan Bolivar, un plan de développement économique et social pour la période 2001-2007. En novembre 2001, il prend 49 décrets-lois dont les principaux sont : la loi sur les hydrocarbures qui interrompt le processus de privatisation de PDVSA, la société pétrolière publique, la loi sur les terres qui permet d'engager la réforme agraire et la loi de la pêche qui protège la pêche artisanale de l'appétit des industriels. S'en est trop pour l'opposition qui engage une lutte sans merci et entreprend le sabotage du processus. Le 10 décembre 2001, le patronat et les syndicats appellent à une grève générale et organisent un Lock-out. Le 11 avril 2002, avec une partie de l'armée, l’opposition organise un putsch et séquestre Hugo Chávez. Les administrations Bush et Aznar s'empressent de reconnaître le nouveau pouvoir. Dans les heures et les jours qui suivent, l'extraordinaire mobilisation populaire à travers tout le pays exige et impose le retour du président et des militaires le ramènent à Miraflores (Voir l’excellent film La Révolution ne sera pas télévisée). Loin de se décourager, le patronat et la bureaucratie pétrolière bloquent l'économie pendant 64 jours (décembre 2002 - février 2003). Enfreignant les mots d'ordre syndicaux, les travailleurs occupent de nombreuses usines et entreprises et expérimentent le contrôle ouvrier. Encore une fois, la mobilisation populaire va mettre en échec cette nouvelle tentative de déstabilisation.Les programmes sociaux
L'opposition défaite, et fort d'un soutien populaire considérable, le pouvoir bolivarien accélère les réformes et récupère la gestion de l’entreprise pétrolière PDVSA. Courant 2003, le gouvernement bolivarien passe à l'offensive et lance les programmes sociaux "les missions". Pour cela, il contourne la bureaucratie institutionnelle (héritée du pouvoir antérieur et qui bloque toute les décisions du pouvoir) et s'appuie sur la mobilisation populaire pour les mettre en œuvre en développant la participation. (cf. R & V n° 222, p.12) 1,5 millions de personnes profitent du programme d'alphabétisation, 120 000 familles bénéficient de la réforme agraire, des millions de vénézuéliens accèdent à la médecine gratuite de proximité, des milliers d'étudiants accèdent à l'université, des milliers de travailleurs bénéficient des formations d’initiation au coopératisme, les "sans papiers" sont régularisés. Les entreprises publiques de l'eau impulsent les "conseils communautaires de l'eau" qui ont pour mission de gérer les réseaux de distribution par quartier. En 2005, 3,5 millions de personnes sont raccordées au réseau de distribution d'eau potable. Les banques sont contraintes de consacrer une partie de leur prêt à l'économie sociale et tout un réseau de coopératives se développe. Le changement social est réel et la vie des plus pauvres s'en trouve bel et bien modifiée. Mais surtout, la population est associée à la gestion de ces programmes à travers les différents comités de gestion de l’eau, de la terre, de l’habitat, de santé, d’approvisionnement, etc. mais ce processus de démocratie active franchit une étape supplémentaire avec la mise en place des conseils communaux en 2006.La seconde étape de la Révolution bolivarienne
Après l'échec du coup d'Etat, l'opposition change de stratégie et utilise le recours institutionnel. Elle se saisit de la possibilité constitutionnelle de remplacer le président à mi-mandat. Elle recueille plus de 15 % de signatures des citoyen-ne-s et obtient l'organisation d'un référendum qui se déroule le 15 août 2004 dont Hugo Chávez sort une nouvelle fois grand vainqueur avec 59 % de NO à sa destitution. Très renforcé, le président peut engager de nouvelles réformes, entreprendre la nationalisation d'entreprises privatisées par les gouvernements précédents (télécommunications, électricité) et développer les programmes de développement des coopératives. Plus de d'un million de coopératives sont créées, la plupart d'entre-elles se voient confier des marchés publics. En avril 2006, la loi sur les Conseils communaux est adoptée. Il s'agit d'instaurer un double pouvoir (Poder dual) au sein de la Révolution vénézuélienne, une articulation entre démocratie représentative et démocratie directe. Ces conseils sont des" instances de participation, d'articulation et d'intégration entre différentes organisations communautaires, groupes sociaux et citoyens". Ils sont chargés de gérer directement les projets qu'ils décident localement, de contrôler les finances publiques et de permettre la lutte contre la corruption. En une année, plus de 18 OOO conseils communaux sont créés par les habitant-e-s.Le renouvellement des mandats électifs
Le 3 décembre 2006, Hugo Chávez est de nouveau plébiscité avec 62 % des suffrages. Il entreprend la seconde étape de la Révolution et annonce qu'il s'agit de mettre en œuvre un projet socialiste : le socialisme du XXIè siècle. Il décide de réformer la Constitution et notamment de revenir sur la limitation à deux mandats pour la fonction présidentielle. Le 2 décembre 2007, la révision constitutionnelle est rejetée par 51 % des voix. Pour la première fois en onze élections, le pouvoir bolivarien est battu. Le peuple ne s'est pas mobilisé et l'abstention est très forte dans les cerros, les quartiers populaires de Caracas. L'opposition refait surface mais peine à confirmer puisqu'elle s'incline mathématiquement de nouveau le 23 novembre 2008 lors des élections municipales et régionales, même si elle conquiert de grandes villes et des états très peuplés, les bolivariens conservent 17 états sur 22 et 80 % des municipalités et récupèrent un million de voix. Entre temps, le président a fait passer par décret certaines mesures qu'il avait tenté d'introduire dans la Constitution et a créé un véritable outil de masse, dévolu à sa cause, la Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV). Dans la foulée, le gouvernement engage la mobilisation pour récolter les signatures nécessaires à la révision constitutionnelle et réviser la règle pour le renouvellement des mandats. En six semaines, le pouvoir recueille 5,5 millions de signatures en faveur de la réforme et le Parlement adopte la modification des articles qui sont soumis au peuple par voie référendaire et approuvé une nouvelle dois avec 54,6 % des suffrages le 15 février dernier. Le renouvellement des mandats électifs n’est plus limité à deux comme l’avait fixé la constitution de 1999. Cette mesure pose de manière prégnante le phénomène de leadership et de la construction d’espaces de débat plus larges.La politique internationale
Dès son accession au pouvoir en 1999, comme ses prédécesseurs, Hugo Chávez mise largement sur le pétrole. Au sein de l’OPEP, largement désinvestie par les gouvernements précédents, les bolivariens investissent d’emblée cette organisation pour revendiquer un prix du baril supérieur à 30 dollars (7 dollars à l’époque). Ce tarif minimal permettrait de financer une nouvelle répartition de la richesse en interne et de développer des relations solidaires avec certains pays des Caraïbes. Le gouvernement vénézuélien passe rapidement des contrats avec Cuba, Haïti et la Dominique qui bénéficient de livraisons de pétrole en dessous du prix du marché ou en échange de services. En 2004, Cuba et le Venezuela lancent l’Alternative bolivarienne pour les peuples d’Amérique (ALBA), qui se veut un projet qui va au-delà des échanges commerciaux et financiers et qui est conçu pour développer des politiques sociales, de coopération et de solidarité entre les peuples (cf. R et V n° 236-237, p.38). La situation géographique du Venezuela lui permet également d’avoir une influence croissante dans les Caraïbes, où il développe de nombreux projets de coopération avec 14 pays. Hugo Chávez ne va cesser de lutter contre le projet d’accord de libre-échange des Amériques (ALCA) que tente d’imposer les Etats-Unis. En novembre 2005, la mise en échec de l’ALCA lors du sommet de Mar del Plata incite à rechercher des alternatives. Le Venezuela intègre le MERCOSUR en décembre 2005.
Dès le début, le gouvernement bolivarien adopte au niveau de la politique extérieure une ligne multilatéraliste et noue des échanges commerciaux avec l’Afrique du Sud, la Chine, l’Inde, l’Iran et la Russie. La politique extérieure de Hugo Chávez se veut pragmatique, il s’agit avant tout de développer les échanges commerciaux et solidaires, pour mieux se démarquer des Etats-Unis. Certaines déclarations hasardeuses font couler de l’encre et à juste titre, comme lorsqu’il apporte son soutien au président biélorusse, Loukachenko, ou qu’il manifeste une certaine mansuétude à l’égard du régime nord-coréen.
Mais ses faux pas ne sauraient cacher une autre réalité qui est celle de la mise en œuvre de plusieurs projets à l’échelle du sous-continent, comme la Banque du Sud (même si elle tarde à être opérationnelle) et surtout la solidarité effective apportée aux présidents de gauche bolivien, équatorien et paraguayen que sont Evo Moralès, Rafael Correa et Fernando Lugo dans les politiques d’éducation et de santé et les projets industriels. Au niveau international, le Venezuela a acquis une stature importante même si l’image se trouve parfois controversée.
Des progrès incontestables mais aussi des limites
Tout d'abord, le processus engagé depuis l'élection d'Hugo Chávez à la présidence de la République vénézuélienne en décembre 1998 a incontestablement transformé le pays en profondeur aux niveaux sanitaire et social. Il importe de saluer les immenses progrès réalisés au bénéfice des plus pauvres en une décennie (sources Institut national de la statistique INE - évolutions entre 1998 et 2007) : réduction importante du taux de pauvreté (passé de 68 % à 30 % de la population), baisse du taux de la mortalité infantile (de 21 % à 14 %), accroissement important des taux de scolarisation de la maternelle ( de 45 % à 61 %) au supérieur (de 22 % à 30 %), augmentation du pouvoir d’achat de 400 %, salaires multipliés par six (soit par trois exprimés en dollars), chômage officiel (de 16 % à 6 %), accès à l’eau potable (de 80 % à 92 %), assainissement (de 62 % à 82 %) et à la santé pour tous ( de 1,36 à 2,25 % du PIB), etc. En une décennie, l'indicateur de développement humain (IDH) a atteint 0,82 (le Venezuela a gagné trente places au niveau mondial). Le Venezuela est le seul pays à avoir atteint les principaux objectifs du Millénaire, bien avant 2015.
La structure économique a évolué. Si l'immense majorité des entreprises est restée dans le domaine privé, l’Etat a repris le contrôle du pétrole, de l’électricité, des télécommunications et d'entreprises industrielles (passées en cogestion sous contrôle ouvrier). Les coopératives ont été développées d'une façon magistrale, même si elles sont très dépendantes des marchés de l’Etat et des communes.
Pour contrer le pouvoir médiatique contrôlé par le capital, tel que le groupe Cisneros, les médias alternatifs ont été développés dans tout le pays avec la multiplication des télévisions et des radios communautaires. TVSUR (la télévision continentale) lancée avec la participation de plusieurs pays d'Amérique du Sud est de plus en plus regardée par les peuples du sous-continent. VIVE TV, télévision populaire est également une référence de media participatif.
En terme de démocratie, l’instauration d’un double pouvoir (représentatif et direct) est unique dans le monde. Le développement rapide des conseils communaux et l’implication de la population dans les différentes instances de décision et de gestion des services sont assez remarquables. La création du nouveau Partie socialiste unifié du Venezuela (PSUV) est sans doute plus problématique. Les partis composant la coalition au pouvoir depuis 1999 ont été sommés de rejoindre cette nouvelle formation, ce qu’ils ont refusés. PODEMOS a rejoint l’opposition, Patria para todos (PPT) et le Parti communiste (PCV) se trouvent marginalisés. A moyen terme, l’éclatement de la coalition au profit d’un seul parti ne semble pas forcément être une bonne stratégie.
En terme de démocratie, l’instauration d’un double pouvoir (représentatif et direct) est unique dans le monde. Le développement rapide des conseils communaux et l’implication de la population dans les différentes instances de décision et de gestion des services sont assez remarquables. La création du nouveau Partie socialiste unifié du Venezuela (PSUV) est sans doute plus problématique. Les partis composant la coalition au pouvoir depuis 1999 ont été sommés de rejoindre cette nouvelle formation, ce qu’ils ont refusés. PODEMOS a rejoint l’opposition, Patria para todos (PPT) et le Parti communiste (PCV) se trouvent marginalisés. A moyen terme, l’éclatement de la coalition au profit d’un seul parti ne semble pas forcément être une bonne stratégie.
Enfin, la grande dépendance à la rente pétrolière peut laisser augurer des lendemains plus difficiles car la crise mondiale va entraîner une chute des cours du pétrole et avoir un impact sur les recettes de l’Etat. Le plan de relance annoncé le 21 mars par Hugo Chávez prévoit notamment un programme d’investissement de 100 milliards de dollars sur quatre ans, une baisse du budget de l’Etat de 6,7 %, une augmentation des salaires de 20 % sauf pour les hauts fonctionnaires, une hausse de la TVA de 9 % à 12 % et la nationalisation d’une partie du secteur bancaire (comme la filiale de la banque espagnole Santander). Mais dans ce contexte de crise, le Venezuela semble plutôt mieux armé que ses voisins, il a notamment réduit ses dettes externe et interne, passées respectivement de plus de 60 % il y a vingt ans à 8 % et à 4,3 % du PIB en 2008. Le pays acquiert donc progressivement une indépendance réelle vis-à-vis des institutions internationales.
Pour tenter de conclure provisoirement, je citerai les observations de deux intellectuels vénézuéliens reconnus, à la fois solidaires et critiques du processus :
- Edgardo Lander, sociologue, pour qui le : « puissant charisme de Chávez complique l’émergence de leaderships alternatifs » et qu’il importe de ne pas « nier les tensions entre le contrôle par en haut et l’autonomie à la base ». Il ajoute que : « les initiatives publiques se heurtent à la difficulté d’avancer dans la construction de formes organisationnelles et de tissus sociaux autonomes qui ne soient pas tributaires, en permanence de l’Etat et de ses ressources ».
Pour lui, le socialisme du XXIè siècle reste à dessiner, ce n’est pas une « doctrine stable ou un corpus de concepts ». « Le processus bolivarien reste sur le plan idéologique extraordinairement hétérogène. Il s’est surtout radicalisé grâce à une mobilisation exemplaire du mouvement populaire. Dans les aspects les plus positifs figurent les expériences de participation populaire (comme les conseils communaux) mais aussi l’impressionnante politisation de vastes secteurs de la population». (1)
- Roland Denis, philosophe, militant autogestionnaire et ex Vice-ministre de la Planification (2002-2003), considère l’expérience comme une avancée incontestable : « S’il existe un héritage que nous a légué la révolution bolivarienne sur l’ordre des luttes d’émancipation, c’est bien l’héritage constituant, élément qui s’est répandu sur tout le continent à la manière d’une matrice de luttes complètement distincte de la vieille conception révolutionnaire de la prise de pouvoir et des directions révolutionnaires » (2) mais il convient pour lui d’accélérer la démocratisation : « Dès maintenant, il est indispensable que des facteurs déterminants confortent la consolidation de l’autonomie politique des organisations et collectifs qui constituent aujourd’hui la base et l’âme du processus révolutionnaire ». (3) et il met en garde sur l’omnipotence du PSUV qui pourrait être tenter de tout vouloir contrôler. (4)
Les orientations et l’approfondissement du processus révolutionnaire restent ouverts, rien n’est figé. Les expérimentations et les ruptures successives ont transformé radicalement le pays. Néanmoins, les rôles prépondérants de Chávez et de l’Etat sont probablement des écueils qu’il faudrait sans doute parvenir à dépasser. Le renforcement du pouvoir populaire et de l’autonomie politique et économique sont certainement des bases indispensables pour ancrer le processus dans une perspective plus autogestionnaire.
Animateur de la commission internationale des Alternatifs
Article paru dans Rouge et Vert n°289 (28 Mars 2009)
(1) Edgardo Lander, « Le processus bolivarien : un projet alternatif en tension ? », interview réalisée par Franck Gaudichaud, Revue Contretemps, janvier 2009 et publié sur le site RISAL le 4 février 2009.
(2) Roland Denis, « Asambleismo Popular Constituyente », www.aporrea.org, 01/09/07.
(3) Roland Denis, « Otra Política », www.aporrea.org, 07/01/08.
(4) Roland Denis, « Construyendo otra política », www.aporrea.org, 21/04/08
Pour tenter de conclure provisoirement, je citerai les observations de deux intellectuels vénézuéliens reconnus, à la fois solidaires et critiques du processus :
- Edgardo Lander, sociologue, pour qui le : « puissant charisme de Chávez complique l’émergence de leaderships alternatifs » et qu’il importe de ne pas « nier les tensions entre le contrôle par en haut et l’autonomie à la base ». Il ajoute que : « les initiatives publiques se heurtent à la difficulté d’avancer dans la construction de formes organisationnelles et de tissus sociaux autonomes qui ne soient pas tributaires, en permanence de l’Etat et de ses ressources ».
Pour lui, le socialisme du XXIè siècle reste à dessiner, ce n’est pas une « doctrine stable ou un corpus de concepts ». « Le processus bolivarien reste sur le plan idéologique extraordinairement hétérogène. Il s’est surtout radicalisé grâce à une mobilisation exemplaire du mouvement populaire. Dans les aspects les plus positifs figurent les expériences de participation populaire (comme les conseils communaux) mais aussi l’impressionnante politisation de vastes secteurs de la population». (1)
- Roland Denis, philosophe, militant autogestionnaire et ex Vice-ministre de la Planification (2002-2003), considère l’expérience comme une avancée incontestable : « S’il existe un héritage que nous a légué la révolution bolivarienne sur l’ordre des luttes d’émancipation, c’est bien l’héritage constituant, élément qui s’est répandu sur tout le continent à la manière d’une matrice de luttes complètement distincte de la vieille conception révolutionnaire de la prise de pouvoir et des directions révolutionnaires » (2) mais il convient pour lui d’accélérer la démocratisation : « Dès maintenant, il est indispensable que des facteurs déterminants confortent la consolidation de l’autonomie politique des organisations et collectifs qui constituent aujourd’hui la base et l’âme du processus révolutionnaire ». (3) et il met en garde sur l’omnipotence du PSUV qui pourrait être tenter de tout vouloir contrôler. (4)
Les orientations et l’approfondissement du processus révolutionnaire restent ouverts, rien n’est figé. Les expérimentations et les ruptures successives ont transformé radicalement le pays. Néanmoins, les rôles prépondérants de Chávez et de l’Etat sont probablement des écueils qu’il faudrait sans doute parvenir à dépasser. Le renforcement du pouvoir populaire et de l’autonomie politique et économique sont certainement des bases indispensables pour ancrer le processus dans une perspective plus autogestionnaire.
Animateur de la commission internationale des Alternatifs
Article paru dans Rouge et Vert n°289 (28 Mars 2009)
(1) Edgardo Lander, « Le processus bolivarien : un projet alternatif en tension ? », interview réalisée par Franck Gaudichaud, Revue Contretemps, janvier 2009 et publié sur le site RISAL le 4 février 2009.
(2) Roland Denis, « Asambleismo Popular Constituyente », www.aporrea.org, 01/09/07.
(3) Roland Denis, « Otra Política », www.aporrea.org, 07/01/08.
(4) Roland Denis, « Construyendo otra política », www.aporrea.org, 21/04/08
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