Par Richard Neuville
Un an après la mort d’Hugo Chávez, la situation
politique reste fortement polarisée au Venezuela. Dans un contexte économique
très tendu, l’absence de remèdes aux problèmes d’insécurité et de corruption continue
de peser sur la société. Malgré une légitimé démocratique incontestable, le
gouvernement renonce à engager un approfondissement du processus et s’expose
ainsi aux offensives de la droite.
C’est le cas depuis le 12 février, le gouvernement
bolivarien est confronté à une nouvelle tentative de déstabilisation politique,
dirigée par un secteur radical de l’opposition, le parti
Volonté populaire, étroitement lié au Tea Party, à l’opposition colombienne et à
des groupes paramilitaires en relation avec Alvaro Uribe (ancien président de
la Colombie).
Leopoldo López, leader du parti Volonté populaire, ne
partage pas la tactique de la majorité de l’opposition (Rassemblement de
l’unité démocratique - MUD), dirigée par Henrique Capriles, qui reconnaît implicitement
la légalité et l’appui populaire du gouvernement et tente de s’en démarquer. La
majorité de l’opposition préfère quant à elle miser sur des manifestations de
mécontentement provoquées par la pénurie, l’inflation et l’insécurité pour
s’engouffrer dans la brèche. Et, elle y travaille activement en lien avec des
secteurs clés de la bourgeoisie qui contrôlent une grande partie de
l’approvisionnement et des importations, contribuant à la montée de
l’inflation.
Accusant un bilan de 19 défaites en 20 élections au
cours de ces 15 dernières années, l’opposition ne croit plus guère à la
possibilité de « renverser » le président Nicolás Maduro par la voie
des urnes, ni même en recourant au référendum révocatoire à mi-mandat comme le
permet la constitution bolivarienne. L’échec de 2005 reste ancré dans sa
mémoire. En avril 2013, elle pouvait encore entretenir un espoir suite au
résultat serré lors de l’élection présidentielle mais les élections locales de
décembre de 2013 auront visiblement anéanti celui-ci puisque le Parti
socialiste unifié du Venezuela (PSUV) et ses alliés avaient remporté 77 % des
communes. En l’absence de perspectives à court terme, Leopoldo López mise sur
une déstabilisation par la violence.
A en croire la presse internationale, les protestations
de « masse » seraient totalement légitimes et démocratiques et
durement réprimées par la « dictature socialiste », les faits
démentent pourtant totalement cette supposée réalité. En cette période de
vacances estivales qui s’achèvent avec les fêtes de carnaval, depuis trois
semaines, les « étudiants » vénézuéliens censés protester contre la
« censure et pour la liberté » ont commis de nombreux actes violents comme
l’incendie de plusieurs bâtiments publics, l’assassinat de membres de la Garde
nationale et même l’agression de journalistes. Mais ils préfèrent cantonner
leurs actions dans les beaux quartiers comme Altamira, Los Cortijos (Est de
Caracas) et ne s’aventurent pas dans les quartiers populaires de l’ouest de la
capitale de crainte d’affronter les masses bolivariennes. Au 6 mars, le
décompte des morts s’élève à 20 personnes, pour l’essentiel abattus par des
francs-tireurs embusqués comme lors du coup d’Etat d’avril 2002, de sinistre
mémoire.
Le gouvernement de Maduro, quelque peu décontenancé, a
bien proposé l’ouverture d’un dialogue inconditionnée à la droite mais celle-ci
s’est empressée de refuser. Pour des raisons historiques, dans un tel contexte,
il est évident qu’il ne faut pas chercher à diviser la droite en faisant des
concessions à l’aile la plus modérée, ce ne serait pas compris par la base
chaviste et affaiblirait encore plus le pouvoir, d’autant que Maduro ne jouit
pas d’une même prestige qu’Hugo Chávez.
Le gouvernement se doit d’approfondir le processus bolivarien
en s’appuyant sur les mobilisations des travailleurs et le développement des expériences
de pouvoir populaire pour contrer les alliances possibles entre la vieille
bourgeoisie et une partie de la bolibourgeoisie s’il veut éviter des
déconvenues.
Richard Neuville
Le 7 mars 2014
PS : Billet inspiré de
l’article de Guillermo Almeyra « ¿Hacia dónde podría ir Venezuela? »
paru dans le journal mexicain La Jornada le 4 mars 2014. A paraître dans Rouge & Vers - Mars 2014.
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